Soupe au caillou

461e édition de La Soupe au caillou

Programme de Revenu de base: des avancées mais aussi des noeuds à défaire

Programme de Revenu de base – Des avancées mais aussi des nœuds à défaire

C’est l’an prochain que le programme de Revenu de base verra enfin le jour.

La première fois qu’il en a été question, c’est lors de la parution du troisième Plan d’action gouvernemental de lutte contre la pauvreté, en décembre 2017. Quelques mois plus tard, en mai 2018, le gouvernement a promulgué une loi visant à instaurer le programme officiellement. Le 23 mars dernier, on a pu prendre connaissance de tous les détails du nouveau programme avec la publication du projet de règlement. Et c’est finalement le 22 juin 2022 qu’a été publié dans la Gazette officielle du Québec le décret concernant l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2023, des dispositions de la majorité de ses articles.

C’est donc dire que la mise en œuvre du Revenu de base aura été longue. Surtout pour les quelque 84 000 personnes qui y ont droit et qui devraient « en principe» pouvoir compter sur un revenu disponible à la hauteur de la Mesure du panier de consommation (MPC). Plusieurs mesures du programme marquent des avancées significatives à l’assistance sociale. Certaines limitations viennent toutefois amoindrir la portée de ces mesures, mettant à mal parfois jusqu’à leur principe même. De quoi nous rappeler ce qui pourrait être la devise de l’assistance sociale : « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? »

Maintenant, voyons voir ce que le programme a dans le ventre.

Admissibilité

Le programme s’adresse uniquement aux personnes qui ont des contraintes sévères à l’emploi et qui ont reçu des prestations de Solidarité sociale pendant au moins 66 mois au cours des 72 derniers. Seule exception : les jeunes dont les parents ont bénéficié du supplément pour enfant handicapé nécessitant des soins exceptionnels sont admissibles au Revenu de base dès l’âge de 18 ans.

Individualisation

La prestation, versée mensuellement, est accordée sur une base individuelle. Ce qui signifie que deux personnes ayant droit au Revenu de base et vivant en couple vont recevoir chacune la totalité de la prestation de base.

Une personne dont le conjoint ou la conjointe est sur le marché du travail et gagne moins de 28 000 $ par année pourra aussi toucher la totalité de la prestation de base. Un salaire annuel plus élevé entraînera une diminution de la prestation, pouvant aller jusqu’à sa suppression.

Prestation

La prestation de base est de 1 138 $ par mois. À ce montant s’ajoute un ajustement de 337 $ par mois pour les personnes sans conjoint·e. À noter que ces montants devraient être indexés le 1er janvier prochain.

Revenus de travail permis

Le calcul des revenus de travail permis se fera non pas sur une base mensuelle, comme c’est le cas actuellement pour tous les autres programmes d’assistance sociale, mais sur une base annuelle. Une personne pourra gagner jusqu’à 13656 $ par année (un montant qui sera lui aussi indexé le 1er janvier) avant que ses revenus d’emploi aient une incidence sur ses prestations. En cas de dépassement, une somme sera déduite des prestations à raison de 0,55 $ pour chaque dollar de revenu de travail supplémentaire. La déduction sera répartie sur 12 mois.

Avoirs liquides

Les avoirs liquides, c’est-à-dire les sommes d’argent ou les actifs transformables en argent à court terme (CELI, dépôts à terme, etc.), ne seront pas pris en compte dans le calcul de la prestation s’ils ne dépassent pas 20 000 $ au total. Tout avoir liquide excédentaire sera déduit de la prestation.

Un programme à élargir

Dans le cadre de la consultation sur le projet de règlement, le Collectif a fait parvenir un avis au ministre Jean Boulet.

Il y reconnaît que le programme de Revenu de base comporte plusieurs avancées (individualisation des prestations, augmentation du revenu, rehaussement des revenus de travail permis, etc.), mais estime que le gouvernement devrait étendre ces mesures à l’ensemble des personnes assistées sociales.

En fait, le plus simple serait que le gouvernement procède à l’extension du programme de Revenu de base afin d’y inclure l’ensemble des personnes admissibles à l’assistance sociale. Pour le Collectif, il est tout simplement injustifiable que seules certaines personnes assistées sociales aient la possibilité de couvrir leurs besoins de base tels que définis par la MPC.

D’ailleurs, il faut souligner que les personnes admissibles au Revenu de base devraient pouvoir compter sur un revenu disponible équivalent à la MPC. Telle est l’intention exprimée dans le dernier plan de lutte contre la pauvreté. Toutefois, le gouvernement utilise encore l’ancienne base de calcul de la MPC (celle de 2008) comme cible à atteindre, ce qui entraîne un important manque à gagner pour les personnes admissibles. Si l’objectif du programme est de leur offrir une aide financière suffisante pour couvrir au minimum leurs besoins de base, il est urgent que le gouvernement rajuste le tir.

Pour lire l’avis du Collectif : https://www.pauvrete.qc.ca/document/avis-rdb-mai22/

Le décret concernant l'entrée en vigueur du programme de Revenu de base a été publié le 22 juin 2022, plus de 4 ans après le dépôt du projet de loi visant son instauration.

La mise en œuvre du Revenu de base aura donc été longue. Surtout pour les quelque 84000 personnes qui y ont droit et qui devraient «en principe» pouvoir compter sur un  revenu disponible à la hauteur de la Mesure du panier de consommation (MPC). Plusieurs mesures du programme marquent des avancées significatives à l’assistance  sociale. Certaines limitations viennent toutefois amoindrir la portée de ces mesures, mettant à mal parfois jusqu’à leur principe même.

De quoi nous rappeler ce qui pourrait être la devise de l’assistance sociale: «Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?»

Voyons voir ce que le programme a dans le ventre.

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